Les conseilleurs ne sont pas les payeurs

Publié le jeudi 24 janvier 2013, par Didier Ménard

Un conflit judiciaire oppose le directeur de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Val de Marne à un médecin généraliste de sa circonscription, le docteur Didier Poupardin.

Le premier entend faire respecter la loi concernant la prescription des médicaments sur des ordonnances bi-zones pour les malades en affection longue durée, distinguant de la sorte les médicaments en rapport avec l’affection de longue durée qui seront remboursés à 100%, de ceux qui n’ont pas de rapport avec la maladie et qui seront remboursés aux taux habituels.

Le second, ayant une conception holistique de la médecine générale, fait un autre choix éthique et décide de permettre l’accès aux médicaments pour ses patients issus des milieux populaires, en considérant qu’il soigne des personnes et pas seulement une maladie, et donc ne respecte pas la procédure de l’ordonnancier bi-zones.

La loi étant sourde à cette conception de la médecine générale, le juge l’applique sans trop de nuances quant au mode d’exercice de la médecine défendu par le docteur Poupardin et le condamne à verser une amende à la CPAM du 94. Mais cela n’oblige pas le directeur de la caisse à faire preuve d’un zèle excessif – en ne respectant pas les délais pour le versement de ladite amende – et d’envoyer prestement un huissier au domicile du docteur « fautif ».

Et puis, il y a l’article 54 de la loi Hôpital Patients Santé Territoire (juillet 2009) qui permet aux CPAM de sanctionner les médecins et professionnels de santé qui refusent les soins aux malades, dont le décret d’application, lui, n’est toujours pas paru. Le directeur de la CPAM 94 a-t-il fait preuve, dans le cadre de son institution, d’autant de zèle pour réclamer la parution de ce décret qu’il en a mis à poursuivre le docteur Poupardin ? En tout cas, à ma connaissance, la Caisse d’Assurance Maladie n’a pas mis autant d’énergie à réclamer la parution de ce texte qu’elle en met pour démasquer les « faux » malades, et tous les soi-disant « abuseurs » du système de protection maladie.

Nous sommes bien là dans le deux poids, deux mesures. Quoiqu’en disent les gestionnaires de la protection maladie concernant l’accès aux soins, quoiqu’en disent les ministres en charge de cette question et au delà des bonnes intentions claironnées sur l’égalité, la justice, la lutte contre la pauvreté, la réalité du quotidien démontre sans cesse que les conseilleurs ne sont pas les payeurs.

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