Comme chaque année, c’est la période de l’examen du nouveau Projet de loi de Financement de la Sécurité sociale à l’Assemblée nationale (adopté en 1e lecture ce 27 octobre). Compte-tenu des défaillances du système de santé, exacerbées par la crise sanitaire, nous étions en droit d’attendre des changements significatifs. Il n’en est rien.
Déjà, le Ségur de la santé, qui porte bien mal son nom, car il ne parle pas de santé mais de soins, n’amorçait aucun changement dans la politique de privatisation rampante du système de soins, et n’avait donc rien d’historique. Mise en concurrence de l’hôpital public avec le privé, déshumanisation du soin, parodie de démocratie sanitaire, pas de stratégie de réduction des inégalités de santé : le Ségur est très loin de ses objectifs et promet, au contraire, une nouvelle dégradation de l’état de santé de la population. De plus, il se centre sur les problématiques de l’hôpital et s’intéresse très peu à l’indispensable coordination des soins au niveau ville-hôpital dont la crise de la Covid a montré pourtant l’importance (vous trouverez l’analyse détaillée du Ségur en pièce jointe).
Le PLFSS 2021 va dans ce sens : malgré quelques avancées (allongement du congé paternité, pérennisation des maisons de naissance), soignant.e.s et patient.e.s n’auront pas été écouté [1]. Nous ne sommes définitivement pas sorti e s de l’austérité budgétaire.
Le gouvernement se félicite de la revalorisation des salaires des professionnel le s de santé tant dans le Ségur que dans le PLFSS. Il y a fort à parier que cela ne suffise pas à éteindre le mécontentement de soignant e s, puisque dans le même temps, la reconnaissance de leur travail quotidien et de leur engagement est piétiné, en témoigne la difficile reconnaissance de la Covid 19 en maladie professionnelle [2]. Sans compter que le gouvernement continue en parallèle de dégrader l’hôpital public notamment par la poursuite de sa politique de fermeture de lits [3].
Comme d’habitude, le mantra du PLFSS est le retour à l’équilibre des finances sociales dont un des points centraux est la lutte contre la fraude. Lutte contre la fraude et contrôle des prestations sociales qui seront facilités par les outils numériques (datamining ou recoupement des données) et notamment la généralisation de la déclaration sociale nominative et le prélèvement à la source permettant la mise en place du dispositif de ressources mensuelles (DRM). Aucun mot en revanche sur un quelconque renforcement de lutte contre la fraude aux cotisations patronales, pourtant bien plus élevées que la fraude des particuliers aux prestations... [4]
De plus, l’introduction d’une participation forfaitaire lors de passages aux urgences non suivis d’hospitalisations (Forfait patient urgences, FPU), risque d’éloigner du soin les personnes les plus précaires [5].
Quels changements dans nos pratiques ?
Dans l’optique de ce retour des finances sociales à l’équilibre, le PLFSS prévoit un contrôle toujours plus renforcé des prescriptions : remise en cause de la pertinence et de la qualité des soins en ville (1 milliard d’euros d’économie prévu) et remise en cause de la prescription d’arrêts de travail et de transports (300 millions d’euros d’économie). De même, on retrouve la volonté de développer des alternatives à l’hospitalisation, faisant reposer toujours plus de responsabilités et donc de charge de travail sur le secteur de ville pourtant déjà en difficulté.
Par ailleurs, à noter, le report de l’échéance de la convention médicale à fin 2022, la raison principalement invoquée étant la tenue des élections professionnelles de 2021. Les syndicats libéraux sont d’ailleurs déjà en campagne pour défendre leurs intérêts, notamment la revalorisation des actes. Même la crise de la Covid 19 ne les aura pas décidés à faire de leur priorité la défense d’un système de soins solidaire.
Dans la continuité de notre travail d’analyse sur le plan « Ma santé 2022 » [6], vous trouverez ci-joint une proposition d’analyse de ce Ségur de la santé. Vos réactions, questions, commentaires, nous intéressent, n’hésitez pas à nous les faire partager.