Le débat parlementaire sur le projet de loi HPST est annoncé pour février 2009. Derrière les titres des chapitres du projet de loi, quelles sont les réalités ?
Modernisation des établissements de santé : une médecine à plusieurs vitesses
Il s’agit de gérer l’hôpital comme une entreprise, d’y introduire plus d’activité privée, de fermer des services hospitaliers publics et d’accélérer le transfert des activités « rentables » vers les cliniques privées. Pour les patients : toujours moins de soignants, des séjours rapides, des consultations privées et des dépassements d’honoraires. Notre société laissera-t-elle à la porte des hôpitaux étranglés financièrement les patients atteints de pathologies complexes et non rentables ?
Accès aux soins : une aggravation
Il est prévu de limiter (!) les refus de soins aux patients ayant la CMU. Ce sera à l’Assurance maladie de sanctionner les médecins pratiquant ces refus, puisque l’Ordre des médecins se refuse à le faire… Cela n’empêchera pas les franchises et les dépassements d’honoraires de continuer à fleurir…
Les médecins généralistes sont nommés « professionnels de premier recours », belle lapalissade ! Ils seront toujours payés à l’acte, sans financement pour organiser la prévention, coordonner les soins, ni garantir l’indépendance de leur formation continue.
Pour inciter les jeunes à travailler dans les lieux où il n’y a plus de médecins, il est prévu d’augmenter dans ces zones les places aux concours de médecine. Mais les jeunes médecins demandent avant tout des conditions d’exercice différentes de l’exercice libéral pur, et formatrices, comme dans des maisons de santé.
Prévention et santé publique : le parent pauvre et l’intervention grandissante des industriels
On interdira les cigarettes bonbons... mais pas question de recherches sur les causes environnementales des maladies ni de développer la médecine scolaire ou du travail, bien au contraire. On développera « l’éducation thérapeutique » : les patients seront-ils sommés de se traiter, sous peine de moindre remboursement, et conseillés chez eux par ceux-là même qui vendent les médicaments ?
Organisation territoriale du système de santé : l’atteinte à la démocratie
Toutes les décisions seront prises par des Agences Régionales de Santé, sous tutelle directe de l’Etat, depuis les missions des directeurs d’hôpitaux, jusqu’au fonctionnement des services avec exigence de rentabilité. Les caisses d’Assurance maladie perdront le peu de pouvoir qui leur reste. C’est la fin de toute illusion de contrôle citoyen et c’est laisser libre champ à l’Etat pour accélérer le rationnement sous prétexte de rationalisation.
Ce projet de loi, s’il est adopté, aggravera les inégalités de santé, tant sociales que territoriales.
En ces temps où nous constatons tous les jours à quel point les contraintes de rentabilité désorganisent les équipes soignantes, nous appelons à la mobilisation pour obtenir une réforme qui apporte un réel bénéfice aux citoyens :
Une réforme qui :
- garantisse sur tout le territoire des services publics de santé de qualité, accessibles à tous, avec entre autres un secteur hospitalier public, général et psychiatrique, ayant les moyens de bien fonctionner ;
- organise la coordination du secteur hospitalier avec le secteur ambulatoire général et psychiatrique ;
- permette l’installation des soignants dans des structures de travail collectives, pluridisciplinaires et financées par la solidarité ;
- installe une véritable politique de prévention et d’éveil à la santé, à l’école, au travail, dans notre milieu de vie, indépendante des lobbies pharmaceutiques et industriels ;
- mette en place une véritable démocratie sanitaire avec un échelon local de coordination de l’ensemble de la politique de santé sur un secteur ;
Patrick DUBREIL, Président
Syndicat de la médecine générale
Marie NAPOLI, Présidente
Union syndicale de la psychiatrie