J’ai été démarché par la Déléguée à l’Assurance Maladie (DAM) pour que j’aille sur l’espace pro d’Améli et que je me familiarise avec les « outils » professionnels du 21e siècle, que-dis-je, du 3e millénaire !
J’ai d’abord vérifié que les patients qui n’avaient pas leur carte ou dont la carte n’était pas à jour si leur CMU était encore active,
Je me suis ensuite évertué à faire mes demandes d’imprimés Cerfa par ce nouveau média,
J’ai interrogé le site internet pour rechercher les tiers-payants,
J’ai également déclaré en ligne les nouveau contrat médecin-traitant,
J’ai aussi récupéré la liste des patients dont je suis le médecin traitant,
Je me suis même « amusé » à déclarer les patients décédé sur le site relié aux données de l’INSERM,
J’arrive même à trouver le temps pour remplir difficilement des protocoles de demande d’ALD,
Je me suis enfin « amusé » à regarder les courbes de mon profil d’activité (mais de toute façon, ces courbes, je m’en fout, j’adhère pas au P4P...),
Il parait même que je pourrais regarder avec la carte Sesame Vitale du patient ses remboursements d’acte (le fliquer quoi...).
Mais il y a un truc que je refuse de faire, c’est de remplir les avis d’arrêt de travail en 5 clics !
Pourtant la DAM est revenue à la charge plusieurs fois. « Mais docteur, vous verrez c’est tellement facile ». Même le correspondant informatique m’a téléphoné pour me dire qu’il avait consulté mon dossier et qu’il avait constaté que j’utilisais bien les services de l’Espace Pro d’Améli, mais qu’il était étonné que je ne fasse pas les arrêts de travail. Il a voulu savoir pourquoi.
Alors j’ai prétexté que je trouvais ça trop long, que c’était compliqué, que je ne voulais pas être responsable de réduction d’effectif à la CPAM... que je n’étais pas rémunéré pour ça.
Et à chaque fois que j’argumentais, il avait une réponse toute trouvée. C’est à croire qu’il avait peaufiné son discours, le gus ! Il était prêt à me consacrer du temps et venir me montrer à mon cabinet comment faire...
Alors à cours d’argument je lui ai rétorqué que je boycottais ce service. Et là j’ai senti que j’avais marqué un point ! Silence à l’autre bout du fil, fin du beau discours. J’ai ressenti la même satisfaction que lorsque j’arrive à me débarrasser des démarcheurs téléphoniques qui cherchent à vendre du conseil en défiscalisation en leur disant que je ne paie pas d’impôt sur le revenu (niark, niark, niark).
Alors outre cette petite satisfaction personnelle, je m’interroge sur le fait que ces gentils employés de la CPAM regardent mon profil pour savoir pourquoi je ne fais pas appel à ce téléservice ? Pourquoi, quand je vais sur le site de Espace pro et que je clic sur didacticiel comme si c’était la première fois, on me montre comment faire un arrêt de travail en 5 clics ?
Serait-ce que la Sécu a un grand intérêt à ce que je l’utilise ?
Serait-ce que les utilisateurs des arrêts de travail en 5 clics sont influencés par les menus déroulants qui sont proposés ?
Serait-ce que les médecins choisissent alors plus facilement les durées proposées ?
Serait-ce que pour les patients ayant une lombalgie commune avec un travail sédentaire, leur arrêt maladie dépasse moins souvent 1 jour comme cela est suggéré dans le site et sur les référentiels de durée que l’HAS a pondus il y a 2 ans ?
Serait-ce grâce à ça que Frédéric Van Roekeghem se félicitait de voir les indemnités journalières diminuer de 1.6% en 2012 (http://m.franceinfo.fr/economie/les-depenses-de-sante-en-recul-historique-en-2012-855495-2013-01-09) ?
Serait-ce alors que l’intérêt économique de la CPAM passerait avant la santé de nos patients ?
Alors au même titre que je boycott la P4P, je boycotterai le service des arrêts de travail en 5clics et ce tant qu’ils seront assujettis à des pseudo références de l’HAS qui aurait mieux fait de se taire (une fois de plus).
Et vous, comment faite-vous ?
Est-ce qu’il y a des arguments pour dire que le patient peut y avoir un intérêt ? Plus rapide ? Moins d’erreur ?