Par le décret n°2018-1340 [1], la visite d’information et de prévention (VIP) des apprenti e s pourra dorénavant être réalisée par tout médecin exerçant en secteur ambulatoire, à titre expérimental. Ce décret est entré en vigueur au 1er janvier 2019, et s’appliquera aux contrats conclus entre le 30 avril 2019 et le 31 octobre 2021.
A ce jour, cette visite médicale est réalisée par un
e professionnel le en santé au travail (médecin du travail ou infirmier e en santé au travail) dans un délai de 2 mois suivant la prise de poste. Le service de santé au travail doit répondre dans les 8 jours suivant la sollicitation de l’employeur euse. Le décret trouve sa justification dans le dépassement fréquent de ces échéances.Les difficultés que rencontrent les services de médecine du travail pour répondre aux employeur
euse s et organiser les visites médicales dans les délais sont réelles. Il existe un déséquilibre entre le nombre croissant de dossiers à traiter, de salarié e s à suivre et des effectifs médicaux en baisse. Mais la médecine générale ambulatoire traverse des difficultés similaires. L’ANIMT et le SMG s’associent pour rappeler que la santé des salarié e s et la prévention des risques doivent rester les seuls moteurs de l’organisation de la santé au travail.Nous considérons que les services de santé au travail sont les seuls légitimes à réaliser les visites d’information et de prévention des travailleur.euse.s du fait de leurs compétences spécifiques. Les médecins du travail connaissent les entreprises, l’environnement de travail des salarié
e s et les risques professionnels auxquels ces dernier.e.s sont exposé.e.s, contrairement aux médecins généralistes qui n’y ont pas d’accès direct. La place particulière des services de santé au travail n’entrave pas pour autant leur autonomie d’action vis-à-vis des employeur.euse.s dans le but premier d’accompagner les salarié.e.s et de préserver leur santé. En visant spécifiquement les apprenti.e.s, ce décret risque de limiter la transmission de savoirs et d’outils aux salarié.e.s qui débutent leurs carrières. N’est-ce pas une injure faite aux apprenti.e.s de considérer que la prévention de leur santé au travail peut être assurée sans les compétences spécifiques à la médecine du travail ?De plus, selon le SMG, la médecine générale a déjà fort à faire avec ses propres domaines de compétences et n’est absolument pas en mesure (et ne souhaite pas !) absorber toutes les missions dont sont « déshabillées » les autres spécialités (cf. le suivi des patient
e s après une chirurgie ambulatoire, etc.) Les généralistes ne sont pas des bouche-trous. Bien sûr, ils/elles sont prêt e s à travailler avec les médecins du travail, dont les compétences spécifiques sont très utiles aux patient e s et aux soignant e s, mais non pas à leur place.Ce décret n°2018-1340 fait également écho au rapport de la députée Mme Lecocq paru en août 2018, dont l’une des propositions était la réalisation du suivi individuel par des médecins généralistes pour certaines catégories de salarié [2], mais aussi par le Collège des enseignants de médecine et santé au travail ainsi que d’autres organisations, pour des raisons similaires à celles énoncées ci-dessus.
e s. Il s’agit de l’un des points problématiques soulevés sur ce rapport, notamment par l’ANIMT lors d’un précédent communiquéPlutôt que de renvoyer les visites des apprenti
e s à la médecine ambulatoire (ainsi que tout autre type de visite relative à la santé au travail), nous pensons qu’il est du devoir de l’État de veiller aux moyens humains, techniques et économiques de la médecine du travail, et que l’action de celle-ci ne soit pas entravée à chaque nouvelle évolution de la législation.