Ne soyons pas systématiquement négatif. Le rapport que Mme Hubert vient de remettre au Président de la République propose une logique et c’est cette logique qui est la nouveauté. Il ne s’agit pas d’un catalogue de revendications exprimées par les acteurs de la médecine libérale, il s’agit d’un projet qui met en cohérence ces revendications. Beaucoup de changements sont enfin actés comme, par exemple, celui de favoriser l’exercice regroupé. On aura seulement perdu 30 ans : en 1980, cet exercice était proposé par le Syndicat de la Médecine Générale. Mme Hubert, alors jeune médecin généraliste engagé au sein de la droite politique, a fortement combattu cette nouvelle organisation des soins, aujourd’hui elle la défend, il n’y a que les c… qui ne changent pas d’avis !!
Mais, car il y a un mais, la question qui est posée est de connaître l’avenir de ce rapport, surtout en période électorale. Ce rapport a-t-il pour vocation de rassurer un corps électoral traditionnellement de droite, qui a manifesté sa mauvaise humeur lors des derniers scrutins, ou véritablement de servir de base à une transformation du système de l’offre de soins pour le faire évoluer vers un système d’offre de santé ? On a des doutes ! Car, au moment même ou Mme Hubert rend son rapport, le premier Ministre nous explique que, les caisses étant vides, c’est une politique de rigueur qu’il entend conduire. Or, le rapport de Mme Hubert n’est concevable que s’il s’accompagne d’investissements pour le long terme : ne le dit-elle pas en préambule ?! Nous pouvons craindre que, sans moyens réels, ce rapport finira par rejoindre l’armoire des regrets. Si jamais, par un miracle politique, le gouvernement changeait de politique économique et se mettait à taxer les riches et non plus les malades, pour conduire une véritable politique de relance, nous tomberions sur un autre obstacle peut-être encore plus difficile à dépasser. C’est l’obstacle du conservatisme qui existe aussi bien au niveau des plus libéraux des médecins qu’au niveau des plus archaïques institutions technico-administratives.
Pour conduire le changement, il faut faire preuve d’imagination, d’innovations, de souplesse, de flexibilité, il faut savoir prendre des risques, contourner les obstacles, quitte à s’arranger avec la réglementation, le temps qu’elle s’adapte… C’est un changement de culture qu’il faut mettre en œuvre. Je doute que le corporatisme médical des syndicats très libéraux puisse s’effacer devant cette évolution. La mise en œuvre du rapport de Mme Hubert - que nous voulons -, c’est le début de la fin du pacte libéral de 1927. Les torpilles sont déjà pointées sur la réforme, qui tirera le premier ?
Didier Ménard