Retour sur la fête de la Sécurité sociale le 21 octobre 2023 à La Ricamarie

Publié le mardi 12 mars 2024, par SMG

Dans le cadre du Tour de France pour la santé, le SMG a participé à la fête de la Sécurité sociale à St Étienne le 21 octobre 2023.
Une table ronde avait pour thème la reprise en main et l’élargissement de la Sécu pour répondre aux besoins du XXIe siècle. Ce fût l’occasion de présenter notre manifeste pour une assurance maladie obligatoire universelle remboursant à 100 % (AMOUR 100 %).
Des ateliers de « reprise en main de la Sécu » ont ensuite eu lieu.

Vidéo de la table ronde et compte-rendu des ateliers ici : https://www.cnnr.fr/appel-unitaire/

Ci-dessous la retranscription de l’intervention du SMG :

"Bonsoir à toutes et tous,

Merci tout d’abord pour l’invitation. Venir parler de la Sécu cela nous rend super heureuses. C’est un sujet qui nous porte.
Le SMG est un syndicat qui est non corporatiste, qui défend la santé comme un bien commun et qui pense que « soigner est politique ». En pratique, il y a beaucoup de médecins généralistes, libéraux et salarié-es mais pas seulement, le SMG est ouvert aux usager.eres et à toustes. Nos axes de réflexions sont l’accès aux soins, la lutte contre les inégalités sociales de santé, le travail collectif avec une réflexion sur les alternatives aux schémas libéraux. Le SMG s’oppose aussi au paiement à l’acte et à la performance. Nous travaillons sur le numérique en santé et, historiquement et encore aujourd’hui le SMG œuvre pour la dissolution de l’Ordre des médecins.
La question de la « Grande Sécu » a été réouverte par le gouvernement en 2021, dans le contexte de la pandémie de Covid-19.
Le SMG a entamé un travail collectif en 2022 qui a aboutit à un texte d’analyse rassemblant les arguments pour une Assurance Maladie Obligatoire Universelle Remboursant à 100 % qui forme l’agréable acronyme AMOUR 100 %.
En décembre 2022, nous avons fait nos rencontres annuelles à Paris dont le sujet était : comment passer à l’action pour que ce projet advienne ? Nous avons eu envie d’essayer de former un groupe de plaidoyer national et nous avons essayé d’écrire un manifeste qui se voulait synthétique, simple, qui essaie de rassembler largement, qui soit contagieux et irrésistible pour que le projet ait lieu.
Il se trouve que ce manifeste rejoint de nombreuses propositions du CNNR.

Dans une consultation médicale, il se passe plein de choses politiques qui appartiennent à la vie de la cité et donc tout ça, c’est un intime politique et, notamment, il y a tous les rapports de pouvoir qui peuvent exister entre le corps d’une personne, le corps d’un individu et la société. Le corps d’un individu, c’est-à-dire sa vie intime, ses vulnérabilités, sa vie familiale, les violences éventuelles, la vie relationnelle, la vie sociale, son statut administratif, sa vie professionnelle et la société qui est traversée par des inégalités et la violence sociale, que ce soit des inégalités territoriales, mais aussi la violence de classe, la violence coloniale ou la violence patriarcale.
Du coup, entre ce corps et cette société, il y a aussi la question de comment cette société intègre cet individu avec sa situation particulière. Est-ce qu’il y a une valorisation, une prise en compte de cet individu ou au contraire une discrimination, un rejet ?
Donc, ces intimes et ces vulnérabilités politiques sont tabous, vous l’aurez peut-être remarqué, on n’en parle pas aux parties de belotes, on n’en parle pas facilement entre nous, on ne fait pas de tribune là-dessus. Parlons-en pour mobiliser. Nos vulnérabilités nous appartiennent, ces intimes sont politiques et c’est important de mobiliser à partir de là.
Quelle est la place pour les médecins dans la reprise en main de la Sécu ?
Nous voulions saborder directement cette idée.
Historiquement, les médecins ont toujours défendu leurs privilèges et n’ont jamais défendu le bien commun. Ils sont là, ils existent, on va faire avec eux et nous en sommes, il y a un bon médecin dans chaque médecin.
C’est important bien évidemment que les professionnel.les de premiers recours (les gens à qui on a affaire en premier : sage-femme, médecin, infirmier.e, pharmacien.ne, tous ceux qui font les cartes territoriales du premier recours) puissent être incorporés dans la reprise en main de la Sécu et puissent être force de proposition, à condition qu’ils aient une réflexion collective et un recul sur leur pratique, sur les besoins, sur le système de santé et qu’ils soient prêts à lâcher le pouvoir et à ne pas séquestrer ce qu’ils perçoivent dans leur espace professionnel.
On perçoit ces intimes politiques qui sont de vraies informations très intéressantes politiquement.
La consultation avec le colloque singulier n’est pas un espace politique, ce n’est pas un espace d’éducation populaire, c’est un espace de rapport de pouvoir.
Donc pour pouvoir faire avec ces professionnel.les, il va falloir rejoindre et faire avec des syndicalistes, des gens tirés au sort dans une dialectique, avec des contre-pouvoirs pour que tout le monde puisse être autour de la table.

Au SMG, nous constatons l’importance du renoncement aux soins et l’efficacité d’un remboursement des soins à 100 % pour y remédier, lorsqu’il existe. C’est par exemple le cas avec les Affections Longue Durée (ALD) même si ce n’est pas un système parfait puisqu’il reste des franchises qui sont à la charge des patientes et des patients.
Il y a un exemple qui se rapproche actuellement du modèle que l’on défend. C’est le régime local obligatoire d’Assurance maladie complémentaire d’Alsace-Moselle.
Il étend la prise en charge par la Sécurité sociale pour le remboursement des frais de santé à grande échelle puisqu’il concerne 2 millions de bénéficiaires. En contrepartie, la cotisation salariale est majorée. La gouvernance n’est pas paritaire (= autant de réprésentant.es des employeur.euses que des salarié.es). Ce sont des élus syndicaux qui décident des orientations et les employeurs et employeuses n’ont qu’un rôle consultatif.
Ce régime local est à l’équilibre financier. Ceci s’explique par le fait qu’il puisse adapter le taux de cotisations sociales à ses dépenses et que ses coûts de gestion sont très faibles, comme on en a déjà parlé.
Ce régime démontre que la gestion de l’Assurance maladie est meilleure lorsqu’elle est réalisée par les principaux et principales intéressé.es.
Donc il nous paraît nécessaire déjà d’étendre le remboursement à 100 % par l’Assurance maladie obligatoire et de la rendre réellement universelle (c’est-à-dire incluant toutes les personnes qui vivent sur le territoire, sans aucune condition (ce dont parlait monsieur Le Maire)). Nous proposons de fusionner tous les régimes en un seul en y incluant bien sûr les bénéficiaires de l’Aide Médicale d’État (AME).
Ce régime prendrait en charge totalement les frais de santé dans un périmètre de prise en charge, étendu et défini selon les besoins de le population, sans condition de résidence ni de ressource. Nous parlons de « périmètre de prise en charge » plutôt que de « panier de soin » qui fait un peu penser à un système capitaliste.
Nous insistons sur la nécessaire indépendance des personnes qui prendraient les décisions au sein de la Sécurité sociale, notamment vis-à-vis du lobby industriel, mais aussi vis-à-vis de l’État.
Nous proposons aussi de mettre les principes de la Sécurité sociale dans la constitution.
Le mode de financement principal serait la cotisation sociale obligatoire.

Le dernier point est sur la question de la gouvernance. Il y a une reprise en main culturelle à faire pour des choses qui ont déjà été abordées et qui sont finalement assez consensuelles pour :
-  une réappropriation de la gestion de l’Assurance maladie par les habitantes du territoire (quelle que soit leur nationalité et le temps passé sur le territoire) ;
-  sortir d’une gestion par l’État (l’État qui fait du contrôle social des classes populaires et qui est aussi un écran superbe pour privatiser et enrichir les classes dominantes).
Cela passerait par mettre en place un démocratie directe et participative, par du tirage au sort et on a imaginé (au lieu des assuré.es sociaux.ales et des employeur.euses) trois collèges : 60 % de salarié.es, 20 % d’usager.es hors emploi (ces idées sont à affiner, nous les amenons au débat, nous n’avons pas la science infuse et nous sommes là pour apprendre et faire du débat et avancer sur la bataille des idées) et 20 % pour les employeur.euses.
Du coup, je vais revenir sur ce collège hors emploi. On va affiner. Les personnes concernées par la vulnérabilité sociale ont une conscience politique des rapports de force et de leur vulnérabilité à partir du moment où elles parlent entre elles. Toutes ces personnes existent, il y a déjà plein de gens qui sont bénéficiaires de la Sécurité sociale à 100 %. Il y a déjà les gens en affection longue durée, en ALD (12 millions de personnes), il y a (alors ces gens ne son pas forcément l’un ou l’autre) des bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire sans participation, mais aussi avec participation financière et il y a les bénéficiaires de l’aide médicale d’État. On pourrait aussi mettre dans des personnes qui pourraient en bénéficier : des gens au RSA, des saisonniers, les chômages longue durée. Donc ça c’est 5 millions 3 qui ont recours à complémentaire santé solidaire et 4 millions qui y auraient droit mais qui n’y ont pas recours à cause du renoncement aux droits.
Donc tous ces gens existent, il faut qu’on arrive à faire une place politique à ces personnes dans la gouvernance et que ces personnes puissent parler entre elles en groupe non mixte ; c’est-à-dire faire émerger leur parole politique, leur conscience politique de leur situation et pas qu’elles se retrouvent comme d’habitude écrasées dans des échelles sociales où finalement elles vont taire, il va y avoir la honte, il va y avoir pleins de choses qui vont faire que les sujets ne vont pas émerger et que d’autres vont prendre le dessus ; comme le rapport au travail, le rapport aux revenus. Il y a des sujets qui sont plus politiquement usuels.
Alors comment s’y prendre pour se réapproprier la Sécu ?
Donc commencer (comme on le fait là). Il y a le Tour de France de la santé dont je vais rajouter deux mots. Donc ça a émergé d’un collectif qui s’appelle Notre santé en danger, qui existe depuis 2010 ou 2012, et ça se mobilise depuis le 11 septembre à la Bourse du travail à Paris. Il y a une carte participative avec tout un tas de mobilisations autour du PLFSS. Il y a même des gens qui se sont proclamés du Tour de France de la santé alors que ça n’avait pas été coordonné. C’est assez beau à voir et ça donne envie de le refaire l’année prochaine et l’année d’après et encore après.
Ensuite : faire groupe. On s’est dit d’abord il faut qu’on fasse groupe entre personnes motivées, qu’on se mette la bonne ambiance, qu’on fasse des fêtes de la Sécu, qu’on milite et qu’on vive. Puisqu’en fait c’est ça qu’on fait. Et pour faire boule de neige, pour contaminer en fait.
Et ensuite faire des lieux d’accueil et de convivialité. Donc des lieux d’accueil avec une permanence régulière, pourquoi pas des groupes de parole de personnes entre elles. Faire de la formation pour de l’auto-défense administrative, pour les droits, dans les soins... Parce que tout ça ce sont des savoirs en fait. On ne naît pas avec la science infuse de comment ça va se passer la consultation avec le cardiologue. En fait ça s’apprend. Et quand on a une maladie cardiaque, des fois, il n’y a qu’au bout de 5 ans qu’on va comprendre qu’il va nous dire ça et que nous on va dire ça et qu’on va négocier ça et qu’à la fin on va quand même avoir l’ordonnance même s’il n’était pas d’accord au début. Il faut aussi ouvrir des espaces au sein des espaces de soins existants : centres de santé, maisons de santé. Se former en collectif d’usager.es et aller dire « nous on veut un bureau une fois par semaine pour faire une permanence, pour savoir qui n’a pas recours à ses droits, on veut informer sur... ».
Et ensuite il faut occuper les bureaux de la Sécu, la rue...
A suivre, ce débat n’appartient pas qu’à moi, cette parole n’appartient pas qu’à moi.

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