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Lettre ouverte aux EGOS - 31 janvier 2008

Publié le jeudi 31 janvier 2008

Le SMG rend publique la lettre qu’il a adressée à Madame Podeur et à Monsieur Berland, pilotes des Etats Généraux de l’Organisation de la Santé (EGOS).

Nous n’avons pas été invités à nous exprimer sur cette importante question de l’organisation de l’offre de soins. Nous lisons ici et là dans la presse que ces EGOS ont permis d’avancer sur des changements qui permettent d’espérer un renouveau de l’offre de soins de premier recours. Quand nous analysons ces propositions de changements, nous nous apercevons que pour l’essentiel, celles-ci sont connues depuis très longtemps. Ne pas vouloir entendre une partie des acteurs de la santé, qui sont depuis des décennies au cœur de la mise en oeuvre de ces transformations, c’est ne pas vouloir comprendre qu’il ne suffit pas que l’innovation soit efficiente pour qu’elle devienne réalité. Nous savons que le plus difficile n’est pas de construire une réponse cohérente à partir de l’évolution de nos pratiques professionnelles, mais de modifier les comportements corporatistes et la culture institutionnelle afin d’intégrer ces innovations à la redéfinition de l’offre de soins. En la matière, la loi n’est pas une garantie suffisante et la convention médicale encore moins. C’est pour ces raisons que nous craignons que ces propositions ne rejoignent, au cimetière des désillusions, les occasions perdues d’adapter notre système de l’offre de soins aux besoins des populations.

Le SMG souligne d’autre part qu’une organisation des soins ne pourra être efficiente que si elle est accessible financièrement à tous les citoyens ; ce qui implique la suppression des franchises sur les soins et une meilleure prise en charge des remboursements par l’Assurance maladie.

Malakoff, le 10 janvier 2008

Madame la Présidente, Monsieur le Président,

Les Etats Généraux de l’offre de soins que vous présidez travaillent actuellement à la réforme du système de l’offre de soins. Nous nous réjouissons de cette initiative qui peut permettre que soient enfin posés les fondements d’une réforme d’un système de soins pour le faire avancer vers un véritable système de santé.

Mais nous constatons que notre syndicat n’est pas invité à exposer ses analyses et présenter ses propositions. Nous savons que d’autres forces syndicales ont souhaité que nous soyions auditionnés. Aussi nous nous interrogeons sur cette éviction du débat.

Notre syndicat a été fondé il y a plus de trente ans. Nous ne sommes pas en nombre d’adhérents le premier syndicat de la médecine générale, mais notre place n’est pas moindre que certains autres syndicats qui signent la convention médicale. Notre légitimité à présenter notre réflexion est réelle. Depuis le refus, opposé pour des raisons politiques* en 1983 à la demande du SMG d’être représentatif de la médecine générale, nous avons fait le choix d’accompagner toutes les transformations qui sont nécessaires pour faire évoluer notre système de distribution des soins vers plus de coordination, de prévention, d’éducation sanitaire. Nous travaillons à développer la place de la personne malade dans la réussite du projet thérapeutique. Nous militons pour favoriser l’accès aux soins de tous nos concitoyens. Cela à conduit le SMG à être présent dans les grandes innovations de l’organisation de l’offre de soins au travers de la construction des réseaux de santé, d’être présent dans la prévention par le développement de la prévention des conduites à risques face à la toxicomanie, les maladies infectieuses, d’être présent dans les modifications de l’exercice professionnel pour une meilleure qualité de l’action de soin par l’investissement dans l’option référent. Nous sommes aussi porteurs des projets de constructions des Maisons de santé de proximité. Nous avons été les précurseurs de cette innovation en construisant en 1983 les premières expériences de regroupement pluri-professionnel par la mise en œuvre des Unités Sanitaire de Base. Nous sommes présents au sein de la formation initiale en tant que généralistes enseignants et nous sommes investis dans la mise en place de la filière universitaire de médecine générale. Nous sommes engagés dans la formation médicale continue. Nous avons toujours œuvré pour une formation et une information médicale indépendante de l’industrie pharmaceutique et au seul service des patients : nous avons toujours refusé le démarchage des laboratoires pharmaceutiques Nous avons aussi largement participé à l’amélioration de l’accès aux soins de tous nos concitoyens notamment par la mise en œuvre de la CMU.

Nous participons au débat public sur toutes les questions qui intéressent la santé par notre soutien à la revue Pratiques, les cahiers de la médecine utopique qui compte aujourd’hui plus de mille abonnés. Nous participons au niveau international à la réflexion sur la place de la santé communautaire.

Toutes ces actions nous laissent croire que nous avons notre place dans ce débat que vous organiser. Nous pensons qu’il est primordial de pouvoir travailler sur une organisation plus collective de l’offre de soins, sur le bilan des expériences en cours comme les Maisons de santé.

Nous avons acquis suffisamment d’expérience dans les processus de changement des comportements et des systèmes pour savoir qu’il ne suffit pas d’avoir une juste analyse de la situation, une vision éclairée de ce qu’il convient de faire, pour réussir le changement. Notre expérience montre que le plus difficile est la transformation des représentations des uns envers les autres et les modifications des cultures qui président depuis si longtemps à notre manière de penser le soin et la santé.

C’est surtout de cela que nous souhaitons débattre lors de vos travaux si vous voulez bien nous y inviter.

En espérant une réponse positive de votre comité de pilotage, veuillez recevoir, Madame, Monsieur, l’expression de notre considération.

Docteur Didier Ménard
Président du Syndicat de la Médecine Générale

* C’est en 1983 que le SMG s’est vu refuser la représentativité alors qu’il satisfaisait aux conditions légales. Le motif avancé par le gouvernement de l’époque fût que cela serait trop conflictuel avec l’autre composante de la représentation syndicale professionnelle.