Le Syndicat de la médecine générale prend acte de la décision de la cour d’appel de l’Isère, qui entérine le C = CS (1) pour les neufs médecins ayant porté plainte contre la Caisse primaire d’Assurance maladie de la Drôme. Cette décision ne peut que satisfaire les médecins, qui sont devenus des « spécialistes de médecine générale », mais ne doit pas faire oublier que la question, légitime, de la juste rémunération des médecins doit se concevoir plus globalement et être débattue démocratiquement.
En France depuis des décennies, le mode de revenus des soignants libéraux, par le paiement à l’acte, fonde le système de soins ; le reste à la charge des patients est un des déterminants majeurs de leur accès aux soins (2). La spécificité (et non la spécialisation) de notre exercice professionnel de généraliste doit être reconnue et valorisée, au même titre que les spécialités médicales, mais la seule augmentation du tarif de la consultation est une réponse insuffisante.
C’est le moment d’exiger une meilleure attractivité du métier et de chercher à réduire le burn out des soignants.
Alors que les discours politiques proposent de nouvelles formes de pratiques dans des réseaux ou des maisons de santé pluridisciplinaires, il est temps pour le gouvernement de joindre les actes à la parole : le travail en partenariat avec d’autres soignants et travailleurs sociaux, la formation indépendante et la coordination des soins font la richesse de nos métiers. Ils doivent être concrètement développés et rémunérés sur d’autres modes (forfait, salariat), ce qui permet de ne pas corréler nos revenus aux nombres d’actes réalisés, mais à notre activité réelle, d’améliorer la qualité des soins (sortie de la course à l’acte), tout en diminuant les inégalités de revenus dans la profession, pointées par de nombreux rapports, dont ceux de l’IGAS.
Le SMG a toujours proposé la sortie volontaire du paiement à l’acte, ainsi que la suppression du secteur II à honoraires « libres » (dépassements d’honoraires) et demandé des tarifs opposables avec tiers payant (dispense d’avance de frais) dans le système du paiement à l’acte. Il ne s’agit pas de remettre en cause la dimension spécifique de la relation individuelle soignant-soigné, c’est le cœur de notre métier. Mais aujourd’hui, les enjeux du système de soins et de santé sont d’assurer une continuité des soins partout sur le territoire, sans obstacles financiers pour la population, de faire face à l’augmentation du nombre de maladies chroniques aux multiples déterminants (3) et à l’accroissement des inégalités sociales de santé.
Pour relever ces défis, nous devons passer d’un système de soins productiviste, inflationniste et individualiste, à un système de santé socialisé, collectif et démocratique, qui reconnaît l’ensemble des métiers du soin et du social et assure une meilleure qualité de vie par l’action sur l’ensemble de ces déterminants de santé (3). C’est un véritable choix de société, qui implique un authentique débat au sein de la population et des politiques publiques de réduction des inégalités sociales.
Pour le moment, nous sommes loin du compte.
Contacts : Jean Louis Gross 06 47 53 45 50 Patrick Dubreil 06 32 70 92 37
(1) C= CS veut dire que le tarif de la consultation du généraliste (C) est de 23 euros, qui est la base actuelle sur laquelle s’échafaude le tarif de la consultation du spécialiste (CS). Tant que les caisses n’auront pas entériné le C=CS, le passage à 23 euros pénalisera les patients qui ne seront remboursés que sur la base de 22 euros.
(2) Les ménages dont les revenus sont les plus faibles déclarent à la fois un plus mauvais état de santé, les taux de couverture en complémentaire santé les plus bas et le plus de renoncements aux soins. <http://www.irdes.fr/EspacePresse/Co...>
(3) origine sociale, niveau d’éducation, qualité de l’environnement, organisation du travail, politique du logement, politique sociale et familiale.